Mali : le Bureau du Vérificateur général (BVG) observe des irrégularités financières dans la gestion de la mine de SYAMA

Fatim
Fatim mars 10, 2020
Updated 2020/03/10 at 6:32 AM

Pour s’assurer de la mise en œuvre de la convention d’établissement société des mines de Syama (Somisy-sa), le Vérificateur général a initié la vérification de conformité de la mise en œuvre de la convention minière, de la régularité et de la sincérité des opérations de recettes et de dépenses exécutées par la Société des mines de Syama (Somisy-sa) au cours des exercices 2015, 2016, 2017 et 2018.

Au Mali, l’or constitue la principale ressource minérale d’exportation. Classé par la Banque mondiale 4ème producteur africain1 d’or et 17ème mondial avec 49 tonnes de production en 2018, après le Ghana, l’Afrique du Sud et le Soudan, le Mali a produit de 2015 à 2018, période sous revue, 203,955 tonnes d’or sur lesquelles 27,851 tonnes proviennent de la Somisy-sa, soit 13,65 %. Ce niveau de production fait de la Somisy-sa la 3ème mine la plus productive après Somilo-sa et Gounkoto-sa.

Quant au contexte environnement général, il faut noter qu’au cours des deux dernières décennies, l’environnement favorable créé par les réformes au plan international et continental a relancé l’investissement étranger dans l’industrie minière en Afrique. Cependant, si cet investissement a permis de renouveler et d’accroître la production et l’exportation minérales, sa contribution à la réalisation des objectifs de développement socioéconomique a été des plus incertaines, voire contestée dans de nombreux pays africains. Un mouvement très visible de la société civile dénonçant les coûts de l’exploitation minière et remettant en question les avantages de la revitalisation des secteurs de l’industrie extractive est apparu dans de nombreux pays africains riches en ressources minérales.

Au chapitre des constatations et recommandations, la mission a révélé que celles-ci relatives aux irrégularités environnementales, administratives et financières.

Pour les irrégularités environnementales, elles sont relatives à des pratiques qui portent atteinte à l’environnement et au développement durable qui sont entre autres le manque d’entretien des canalisations d’eaux usées, l’inobservation des normes au niveau du garage de la société sous-traitante ZFM, le non-respect des modalités de gestion des rejets polluants dans l’atmosphère, le manque d’équipement du systèmes d’épuration de gaz (poussières et fumées) des cheminées de la centrale électrique et de l’usine de production d’or.

La mission a également constaté que la nature et la quantité des déchets dangereux incinérés ne sont pas mentionnées dans les rapports annuels de 2015, 2016 et 2017. Aussi, la mine ne fait pas non plus de rapports circonstanciés sur les cas de dépassements de normes survenus. De plus, les rapports annuels ne font pas état des actions correctives mises en œuvre ou envisagées lors des dépassements de normes. Par ailleurs, aucune information n’a pu être fournie à la mission sur les résultats d’analyse des différents paramètres de pollution attestant les performances des équipements de traitement des polluants atmosphériques.

En ce qui concerne les irrégularités administratives, les vérificateurs ont constaté des dysfonctionnements du contrôle interne notamment la non mise en place de toutes les mesures de sécurité du personnel, le non-respect des dispositions de la convention d’établissement en matière de recrutement du personnel. Il aussi a été constaté que les informations figurant sur la presque totalité des panneaux et affiches présents dans d’autres endroits de la mine sont écrites uniquement en anglais contrairement aux exigences de la convention d’établissement et bien que la majorité du personnel soit composée d’ouvriers ne sachant pas forcément lire et comprendre la langue anglaise. Et, l’insuffisance des mesures de sécurité ne permet pas de couvrir totalement les travailleurs.

S’agissant des irrégularités financières, la mission a mentionné que celles-ci s’élèvent à 227 874 613 295 Fcfa qui se présentent comme suit le Président du Conseil d’Administration de la Somisy-sa a mis en place un emprunt non justifié pour le compte de la société pour 242 302 677 428 Fcfa tiré d’un emprunt irrégulier de 168 655 374 517 Fcfa adossé à un accord non documenté signé entre les responsables de Resolute ML.

Aucun document justifiant le montant inscrit en emprunt

Cet emprunt de Resolute ML est constaté sur la base des seules inscriptions dans le compte “1851 Resolute interco non bloqué” de Somisy-sa. Malgré plusieurs demandes de la mission, la Somisy-sa n’a fourni aucun document justifiant le montant inscrit en emprunt.

La mission a également constaté que l’Assemblée générale de la Somisy-sa n’a toujours pas autorisé la distribution de dividendes à l’État alors que la société a réalisé des bénéfices cumulés à hauteur de 356 828 155 198 Fcfa en fin 2017. Le bénéfice distribuable de la période sous-revue est de 159 585 519 835 Fcfa dont 31 917 103 967 Fcfa devraient revenir à l’État malien. Le directeur général de la Somis-sa n’a pas remboursé un emprunt auprès de l’État du Mali alors que l’article 10 des statuts de société stipule que : “Les actionnaires peuvent mettre ou laisser à la disposition de la société, toutes sommes, produisant ou non intérêts, dont celle-ci peut avoir besoin. Les modalités de ces prêts sont arrêtées par accord entre le Conseil d’Administration et l’intéressé”.

En effet, la mission a constaté que le Directeur Général de Somisy-sa n’a toujours pas remboursé, à l’État malien, un emprunt figurant dans les états financiers de la société pour un montant de 2 719 334 414 Fcfa avec des intérêts cumulés de 1 932 666 382 Fcfa. Le montant total à rembourser à l’État du Mali s’élève à 4 652 000 796 Fcfa. Le Directeur Général de Resolute ML a irrégulièrement mis en place une facilité d’emprunt pour le compte de la Somisy-sa.

Par ailleurs, la mission a constaté que le directeur général de la Somisy-sa n’a pas payé la totalité de la patente et des droits connexes dus. En effet, à l’exception de son Bureau de Bamako, la Somisy-sa n’a pas calculé et payé la patente sur ses bâtiments administratifs. Et, le montant total des droits compromis s’élève à 102 266 780 Fcfa pendant la période sous revue dont 88 927 635 Fcfa pour la patente, 4 446 382 Fcfa pour la taxe de voirie et 8 892 763 Fcfa pour la cotisation due à la Chambre de commerce et d’industrie du Mali (Ccim).

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