Côte d’Ivoire : TotalEnergies se retire de la SIR, des investisseurs africains prennent le relais

Jules Boa
Jules Boa février 20, 2025
Updated 2025/02/20 at 10:29 AM

Un poids lourd de l’énergie plie bagage. Un mastodonte du continent s’installe. Une transaction de plusieurs centaines de millions d’euros. Une entreprise stratégique passe sous une nouvelle tutelle. Un tournant s’opère, redessinant l’industrie pétrolière ouest-africaine. C’est une révolution dans le secteur des hydrocarbures. TOTAL Energies CI, actionnaire de longue date de la Société Ivoirienne de Raffinage (SIR), premier complexe industriel de raffinage d’Afrique francophone, cède l’intégralité de sa participation pour près de 200 millions d’euros au conglomérat nigérian Sahara Energy. Avec cette acquisition, Sahara Energy devient le deuxième actionnaire de la SIR, détenant 27,33 % du capital.

Mais les répercussions dépassent largement les chiffres. Cette cession consacre une mutation historique : désormais, aucun investisseur non africain ne figure au sein de l’actionnariat de la SIR, renforçant ainsi l’autonomie énergétique régionale. Qu’est-ce qui motive le départ de TotalEnergies ? Après plusieurs décennies de présence au capital de la SIR, le groupe français tourne la page, dans une logique de repositionnement stratégique mondial. Depuis quelques années, le géant pétrolier a intensifié sa transition vers les énergies renouvelables, réduisant progressivement son exposition aux raffineries africaines. Ce retrait pourrait également témoigner d’une réorientation vers des marchés jugés plus stratégiques ou plus en phase avec ses nouvelles ambitions énergétiques.

Sahara Energy : la montée en puissance d’un acteur majeur Avec cette prise de participation, Sahara Energy renforce son ancrage sur le marché pétrolier ouest-africain. Fondée en 1996 par Shonubi, Tonye Cole et Ade Odunsi, cette entreprise nigériane s’est hissée parmi les plus influents conglomérats énergétiques du continent, évoluant du commerce de produits pétroliers à la production d’électricité. Actif dans plus de 40 pays, le groupe affiche un chiffre d’affaires annuel de 10 milliards de dollars et compte plus de 4 000 employés. Ce renforcement au sein de la SIR conforte son ambition d’affirmer sa prédominance dans le secteur énergétique ouest-africain.

La SIR, une renaissance économique Après des années marquées par des difficultés financières, la SIR a amorcé un redressement spectaculaire. Après des périodes de crise entre 2014 et 2016, l’entreprise publique ivoirienne a réussi à inverser la tendance, devenant l’un des fleurons économiques du pays. Dès 2017, les premiers signes de relance se manifestent et la SIR retrouve une rentabilité solide :

  • 2018 : 23,3 milliards FCFA de profit
  • 2021 : 24,7 milliards FCFA
  • 2022 : 125 milliards FCFA (+400%), un record historique
  • 2023 : 95,35 milliards FCFA, confirmant la robustesse de son modèle économique

Cette ascension fulgurante, combinée à une prise de contrôle renforcée par un acteur africain, positionne la SIR comme un pivot stratégique de l’économie ivoirienne et du secteur pétrolier régional.

Un signal fort pour la souveraineté énergétique africaine Avec ce changement d’actionnariat, la SIR consolide son identité continentale et ouvre la voie à une plus grande indépendance énergétique en Afrique de l’Ouest. Cette cession, qui propulse Sahara Energy au rang d’acteur clé du raffinage en Côte d’Ivoire, pourrait favoriser une meilleure synergie entre les industries pétrolières ivoiriennes et nigérianes, tout en stimulant des investissements stratégiques dans les infrastructures énergétiques de la région.

Alors que le continent cherche à mieux contrôler ses ressources naturelles et à réduire sa dépendance aux groupes occidentaux, cette opération pourrait marquer le début d’une nouvelle dynamique dans l’industrie énergétique africaine.

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