Menace d’une flambée des prix du pétrole en cas d’escalade des tensions au Moyen-Orient

Jules Boa
Jules Boa avril 26, 2024
Updated 2024/04/26 at 5:40 PM

Une nouvelle flambée des prix du pétrole est à craindre en cas d’intensification du conflit au Moyen-Orient, selon un rapport publié par la Banque mondiale ce jeudi 25 avril 2024. Intitulé « Commodity Markets Outlook April 2024 », ce rapport met en garde contre les conséquences potentiellement graves d’une escalade des tensions entre Israël et l’Iran.

Le rapport souligne que les perturbations de l’approvisionnement en pétrole qui pourraient résulter d’un tel conflit auraient un impact direct sur les prix du baril de Brent, la référence mondiale pour le brut. Le prix du Brent pourrait alors dépasser les 100 dollars, un niveau inédit depuis octobre 2023.

Cette perspective inquiétante s’ajoute aux tensions déjà présentes sur les marchés pétroliers. En effet, le baril de Brent avait déjà atteint les 91 dollars début avril suite à une frappe israélienne ayant visé la section consulaire de l’ambassade d’Iran à Damas. Le prix avait ensuite reflué légèrement, mais restait proche de son plus haut niveau depuis plusieurs mois.

Outre le pétrole, le rapport de la Banque mondiale redoute également une hausse des prix du gaz naturel, des engrais et des denrées alimentaires en cas d’escalade du conflit au Moyen-Orient. Ces hausses de prix auraient des conséquences néfastes sur l’économie mondiale, en particulier pour les pays les plus pauvres.

La Banque mondiale prévoit que les prix du baril de Brent se situeront en moyenne à 84 dollars en 2024, avant de redescendre à 79 dollars en 2025. Ces estimations prennent en compte le conflit en cours entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza, mais excluent une escalade plus large des tensions géopolitiques au Moyen-Orient.

Si les tensions actuelles restent contenues, ces prix resteraient néanmoins supérieurs à la moyenne de long terme observée avant la pandémie de COVID-19, qui était d’environ 57 dollars le baril entre 2015 et 2019.

La Banque mondiale souligne qu’une intensification du conflit au Moyen-Orient pourrait entraîner une flambée des prix du pétrole, du gaz naturel, des engrais et des denrées alimentaires. Cette situation aurait un impact significatif sur l’économie mondiale, en relançant l’inflation sous l’effet d’une hausse des prix de l’énergie.

Même en l’absence d’une nouvelle escalade des tensions géopolitiques au Moyen-Orient, la stabilisation des cours mondiaux des matières premières ne permettra pas de poursuivre la tendance désinflationniste observée au cours des deux dernières années. Entre la mi-2022 et la mi-2023, les cours mondiaux des produits de base avaient en effet chuté de près de 40 %, contribuant fortement à la réduction d’environ 2 points de pourcentage de l’inflation mondiale entre 2022 et 2023.

Cependant, depuis le deuxième semestre de l’année dernière, l’indice des prix des produits de base de la Banque mondiale est resté globalement inchangé. Sans une nouvelle recrudescence des tensions géopolitiques, les prévisions de la Banque tablent sur une baisse de 3 % des prix mondiaux des produits de base en 2024 et de 4 % en 2025. Ces baisses ne seront guère suffisantes pour juguler une inflation qui, dans la plupart des pays, reste supérieure aux cibles des banques centrales, les prix des produits de base se maintenant à un niveau d’environ 38 % plus élevé que celui enregistré en moyenne au cours des cinq années précédant la pandémie.

« La bataille de l’inflation n’est pas encore gagnée. L’un des principaux moteurs de la désinflation, à savoir la chute des cours des produits de base, a atteint ses limites. Cela signifie que les taux d’intérêt pourraient rester plus élevés que prévu cette année et l’année prochaine. Le monde se trouve dans une situation de vulnérabilité : un choc énergétique majeur pourrait saper une grande partie des progrès réalisés ces deux dernières années dans la réduction de l’inflation », explique Indermit Gill, économiste en chef et premier vice-président du groupe de la Banque mondiale.

De son côté, l’économiste en chef adjoint de la Banque mondiale et directeur de la cellule Perspectives pense que cela reste encore peu probable.  « On voit émerger une divergence frappante entre croissance et prix des produits de base : malgré une croissance mondiale relativement plus faible, les prix des produits de base resteront très probablement plus élevés en 2024-25 qu’au cours des cinq années précédant la pandémie. »

Poursuivant, il a également ajouté  que : « cette divergence s’explique en grande partie par des tensions géopolitiques exacerbées qui tirent vers le haut les prix des principales matières premières et contribuent à alimenter des risques de fortes fluctuations des cours. Les banques centrales doivent rester vigilantes quant aux répercussions inflationnistes induites par de possibles flambées des prix des produits de base dans un contexte de tensions géopolitiques élevées. »

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