Le nouveau président du Sénégal, Diomaye Faye, a pris l’engagement de renégocier les contrats miniers, pétroliers et gaziers afin de mieux protéger les intérêts des populations locales. Dans les eaux territoriales, l’exploitation de deux grands gisements pétroliers et gaziers pourrait représenter plus d’un milliard d’euros par an sur une période de trente ans.
Ces champs se trouvent près de Dakar. Les deux gisements majeurs de pétrole et de gaz devraient être exploités avant la fin de 2024. Le champ gazier appelé « Grand Tortue Ahmeyim » est situé à une profondeur de 3,000 mètres au large de Saint-Louis. British Petroleum (BP) et l’entreprise américaine Kosmos Energy exploiteront ce gisement en commun.
On convertira le gaz extrait en gaz naturel liquéfié (GNL). D’ici 2030, les entreprises prévoient une production annuelle de 10 millions de tonnes, ce qui positionne le Sénégal comme le cinquième producteur de gaz en Afrique. Les plateformes d’extraction sont construites par une entreprise chinoise entre les eaux mauritaniennes et sénégalaises. Petrosen, la compagnie pétrolière publique du Sénégal, participe également à ce contrat.
Le groupe australien Woodside va exploiter un autre gisement important, le pétrole « offshore » de Sangomar.La mise en place de ces deux ressources en hydrocarbures a été retardée. En 2014, le contrat gazier a été conclu et en 2004, celui du pétrole.
Le Sénégal joue un rôle essentiel dans l’exploitation de ces gisements, car les opérations, qui devraient commencer fin 2024, pourraient générer en moyenne 700 milliards de francs CFA par an sur une période de trois décennies. Cela revêt une importance particulière car le secteur du tourisme, qui représentait 10% du PIB en 2018, a du mal à retrouver son niveau pré-Covid. Ces nouvelles ressources sont utilisées par le pays pour stimuler son économie.
L’invasion de l’Ukraine a entraîné une augmentation de la demande européenne pour le GNL. Le chancelier allemand Olaf Scholz a effectué une visite à Dakar en mai 2023 afin de garantir l’approvisionnement en gaz de l’Allemagne.
Pour ce qui est de la possibilité pour le président Diomaye Faye de renégocier ces contrats, les nouvelles autorités sénégalaises considèrent les accords conclus sous l’ancienne administration comme défavorables, même si l’administration précédente et la plupart des spécialistes du secteur l’ont contesté. Un audit du secteur minier, pétrolier et gazier a été annoncé par le président. Dans une interview accordée à Bloomberg le 19 mars, le président Macky Sall (2012-2024) a déclaré que même si des améliorations sont envisageables, la dénonciation des contrats existants serait impossible et catastrophique pour le Sénégal.
D’après Ibrahima Bachir Dramé, l’expert pétrolier, il n’y a pas de clauses explicites de renégociation dans les contrats pétroliers, mais il existe des clauses qui régulent les éventuels litiges. Selon l’économiste international et spécialiste du développement industriel, Papa Demba Thiam, il est fréquent de renégocier les contrats miniers ou d’hydrocarbures à travers le monde. Il mentionne des exemples dans la région Amérique latine-Caraïbes où entre 40 et 92% des contrats sont renégociés dans les 1 à 8 ans suivant leur signature.
Dans la Constitution du Sénégal, les ressources naturelles sont la propriété du peuple et doivent être utilisées à son bénéfice. D’après Thiam, les circonstances actuelles sont parfaitement justifiées pour une renégociation des contrats, en particulier en raison des retards dans l’exploitation qui réduisent la rentabilité des projets.
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