Grâce à deux grands projets dans les hydrocarbures, le Sénégal entre dans une nouvelle phase économique. En février, le ministère de l’Énergie a annoncé que le pays produira plus de 30 millions de barils de pétrole en 2025. Par ailleurs, le projet d’exploitation de gaz offshore Grand Tortue Ahmeyim (GTA), à la frontière maritime avec la Mauritanie, a débuté sa production de gaz naturel en janvier.
Ces progrès pourraient entraîner une croissance économique de 8,4 % dès 2025, selon le FMI. Pour le gouvernement, cette dynamique dans le secteur énergétique est une opportunité stratégique pour diversifier l’économie et réduire sa dépendance traditionnelle à l’agriculture et aux matières premières habituelles.
Vers une économie modernisée
Les rues de Dakar témoignent de cette transition grâce à de nombreux projets d’infrastructure en plein développement. Le pays, historiquement centré sur la pêche, l’arachide, le tourisme et les phosphates, a pu attirer des investissements significatifs grâce à un climat des affaires amélioré. Conséquence : une croissance stable d’environ 6 % en 2024, soutenue par des réformes structurelles, une amélioration du système éducatif, et une stabilité politique relative.
Sangomar et GTA : fondations de l’indépendance énergétique
Le champ pétrolier offshore de Sangomar, situé à une centaine de kilomètres de Dakar, marque l’entrée officielle du Sénégal dans la liste des pays producteurs. Exploité en partenariat par Woodside Energy (Australie) et la compagnie nationale PETROSEN, il possède des réserves prouvées de 630 millions de barils, avec un objectif de production quotidienne de 100 000 barils. En janvier, la production a dépassé 3 millions de barils, avec près de 93 % destinés à l’exportation.
Par ailleurs, le champ gazier GTA est prévu pour permettre l’exploitation de 700 milliards de mètres cubes de gaz. Ces deux initiatives devraient générer des revenus annuels moyens estimés à 700 milliards de FCFA (approximativement 1,2 milliard USD) sur trois décennies, stimulant également l’émergence d’industries connexes telles que la pétrochimie et le transport.
Le défi du raffinage local : une étape essentielle vers l’autonomie
Jusqu’à récemment, le pétrole sénégalais était expédié à l’étranger pour être raffiné. La Société africaine de raffinage (SAR), située près de Dakar, traitait surtout du brut importé. Cette situation évolue. Avec une capacité de raffinage de 1,5 million de tonnes par an à la fin de 2023, le Sénégal envisage une augmentation grâce au projet SAR 2.0, visant 5 millions de tonnes d’ici 2030.
Un jalon significatif a été atteint le 13 février lorsque la SAR a raffiné pour la première fois du brut national, produisant ainsi 90 000 tonnes de carburants et dérivés (diesel, essence, kérosène, butane). Ce premier raffinage local marque une avancée vers l’intégration complète de la chaîne pétrolière sénégalaise.
Éviter la dépendance et penser à long terme
Le président Bassirou Diomaye Faye insiste sur une gestion prudente des ressources naturelles. Il souligne que les revenus du pétrole et du gaz seront investis dans des secteurs prioritaires tels que l’éducation, l’agriculture, la pêche et le numérique.
Voulant éviter les erreurs commises par certains pays riches en hydrocarbures, le chef de l’État cherche à échapper à la « malédiction des ressources » en diversifiant l’économie dès le début. Selon l’économiste Papa Daouda Diene, la part du secteur pétrolier dans le PIB demeure inférieure à 5 %, ce qui invite à rester vigilant.
Une opportunité à saisir avec discernement
La montée du Sénégal dans le secteur énergétique présente de grandes perspectives économiques. Le défi réside néanmoins dans la capacité du pays à transformer ces ressources en un moteur durable de développement, évitant les pièges de la dépendance. Les décisions stratégiques prises aujourd’hui détermineront le succès de cette transformation dans les années à venir.